Remise en cause du mécénat d'entreprise : des conséquences lourdes pour les plus fragiles
Le jeudi 6 novembre, la commission des finances de l’Assemblée nationale a validé l’article 50 du projet de loi de finances pour 2020 qui prévoit une baisse du taux de la réduction d’impôt au titre du mécénat d’entreprise de 60% à 40% pour la fraction de dons supérieure à 2 millions d’euros annuels. Alors que les débats en séance publique ont lieu ce soir, les fédérations représentatives des acteurs de la philanthropie et de l’intérêt général tirent une nouvelle fois la sonnette d’alarme sur le danger que représenterait cette mesure pour le financement de nombreux bénéficiaires de causes d’intérêt général.
Pour la première fois depuis la loi fondatrice du mécénat en France, en 1986, un Gouvernement remet en question l’utilité du mécénat d’entreprise, et prend une mesure visant à en diminuer le montant.
Une telle mesure est précipitée : elle n’attend pas les conclusions prévues pour janvier du rapport de la mission parlementaire que vient d’installer le Premier ministre sur le sujet. Cette mission a été confiée à deux députés Sarah El Haïry et Naïma Moutchou et doit faire des recommandations afin de développer la philanthropie française. Et surtout, aucune étude d’impact n’a été réalisée pour étudier l’effet de cette réforme sur les publics bénéficiaires qui vont subir ce nouveau coup de rabot sur leurs finances. L’enjeu est important : plus de 560 millions d’euros de dons chaque année sont en jeu.
Le Président de la République a pourtant lui-même bien compris l’enjeu du mécénat d’entreprise. Le candidat Emmanuel Macron promettait dans son programme d’encourager son développement en s’interdisant de diminuer l’incitation fiscale à faire du mécénat pendant tout son quinquennat.
Quelles sont les motivations du gouvernement dans cette remise en question du mécénat d’entreprise ? Il souhaite faire des économies de l’ordre de 80 M€. Le rapporteur général de la Commission des finances estime en effet que la perte n’est « que » de 80 M€. Mais ceux qui vont subir ces économies, ce ne sont pas les entreprises mécènes, ce sont les hommes, les femmes et les enfants qui reçoivent aujourd’hui le soutien des milliers d’associations sur le terrain. Combien de soutiens scolaires supprimés, combien de chercheurs non financés, combien d’associations de défense des droits des femmes non financées, combien d’établissements pour personnes handicapées concernés… ? Et l’Etat ne prévoit pas à date de se substituer aux entreprises mécènes pour financer ces actions. Les acteurs associatifs ont eu à subir depuis deux ans de nombreuses réformes les impactant négativement, dans un contexte où les besoins sociaux et de services de proximité s’accroissent. Ce projet de réforme est un nouveau coup porté à leur capacité d’action
La mobilisation s’intensifie pour alerter sur les conséquences d’une telle mesure. Le Président de la commission des finances lui-même a déposé un amendement de suppression, rejoint par de nombreux députés, de tous bords, dont plusieurs dizaines de députés de la majorité.
L’ensemble des organisations représentatives du secteur, entreprises mécènes, fondations, associations, ont exprimé leur refus de cette réforme mais fait part de leur volonté de travailler avec le gouvernement pour améliorer le fonctionnement du dispositif actuel, sa déontologie, sa transparence ; plus de 110 acteurs de terrain ont signé une lettre ouverte au Président de la République, faisant part de leur incompréhension et de leurs inquiétudes.
Les parlementaires et les élus locaux connaissent bien, eux, l’utilité du mécénat d’entreprise sur leur territoire. Aussi nous les appelons à attendre les conclusions de la mission parlementaire sur la philanthropie, et refuser la mesure lors du vote de ce Projet de Loi de finances ce soir.
Communiqué commun Admical / CFF / France Générosités / Le Mouvement Associatif