|    06 Septembre 2021

Promulgation de la loi confortant le respect des principes de la République

Après quasiment un an de tumultueux débats, la loi n° 2021-1109 confortant le respect des principes de la République, également appelée « loi contre le séparatisme », a été promulguée le 24 août 2021. Que va changer cette loi pour le secteur associatif et pour les acteurs du mécénat ? Admical fait le point.

Modification pour le secteur du mécénat

Les acteurs du mécénat seront fortement impactés par cette nouvelle loi. On assiste à un renforcement des possibilités de contrôle des fonds de dotation, l’autorisation d’un contrôle aléatoire sur place des organismes délivrant des reçus fiscaux et une nouvelle obligation des OSBL de déclarer les dons et versements reçus chaque année au titre des articles 200, 238 bis et 978 du code général des impôts et pour lesquels ils auront émis des reçus fiscaux.

 

  • L’article 17 renforce le contrôle des fonds de dotation.
  • Lors de leur constitution, l’autorité administrative sera tenue de vérifier non seulement de régularité du fonctionnement du fonds de dotation mais également la conformité de l’objet du fonds de dotation à la définition légale d’un fonds de dotation, telle qu’énoncée à l’article 140, I de la loi n°2008-776 du 4 août 2008.
  • Les fonds dotation doivent désormais transmettre eux-mêmes à l’autorité administrative chargée de leur contrôle, chaque année et dans un délai de 6 mois à compter de la clôture de l’exercice en cours, leur rapport d’activités, leurs comptes annuels et le rapport de leur commissaire aux comptes.
  • A défaut de transmission de ces documents dans le délai de 6 mois à compter de la clôture de l’exercice, l’autorité administrative peut, après une mise en demeure non suivie d’effet dans un délai de deux mois, suspendre, par décision motivée, l’activité du fonds de dotation jusqu’à leur transmission effective.
  • En l’absence de réponse dans un délai de 6 mois suivant la suspension ci-dessus mentionnée, la même autorité pourra alors saisir l’autorité judiciaire aux fins de dissolution du fonds de dotation dans un délai de deux mois suivant une mise en demeure non suivie d’effet.
  • Le pouvoir de l’autorité administrative de suspendre l’activité d’un fonds de dotation et, le cas échéant, de saisir l’autorité judiciaire pour en demander la dissolution se trouve également étendu à d’autres cas de figure. Ainsi, dans les 2 mois suivant une mise en demeure infructueuse, l’autorité administrative pourra décider de suspendre l’activité du fonds de dotation pour une durée pouvant aller jusqu’à 18 mois et, le cas échéant, saisir l’autorité judiciaire pour en demander si dissolution, si elle constate : 
  • que l’objet du fonds de dotation méconnaît la définition légale d’un fonds de dotation, telle qu’énoncée à l’article 140, I de la loi n°2008-776 du 4 août 2008 ;
  • que des dysfonctionnements affectent la réalisation de son objet ;
  • que l’une de ses activités ne relève pas d’une mission d’intérêt général ;
  • ou qu’il méconnaît les obligations de transmission de ses documents administratifs et comptables, ci-dessus mentionnées.

 

  • L’article 18 octroie le droit à l’administration de contrôler sur place la régularité de la délivrance des reçus, des attestations ou de tous autres documents par lesquels les organismes bénéficiaires de dons et versements indiquent à un contribuable qu’il est en droit de bénéficier des réductions d’impôt prévues aux articles 200, 238 bis et 978 du code général des impôts.
  • Ce contrôle ne pourra toutefois pas être engagé sans que l’organisme bénéficiaire en ait été informé par l’envoi d’un avis l’informant du contrôle. L’avis devra impérativement mentionner les années soumises au contrôle et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que l’organisme a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix.
  • Le contrôle ne pourra pas durer plus de six mois à compter de la délivrance de toutes les pièces demandées par l’administration. La procédure pourra être annulée si ce délai est dépassé. 
  • Une fois le contrôle effectué, une procédure contradictoire sera mise en place avant l’application d’une éventuelle sanction.

 

  • L’article 19 renforce considérablement le contrôle de la réalité des versements de dons faits au titre des articles 200, 238 bis et 978 du CGI, ainsi que l’édition de reçus fiscaux émis au titre de ces dons.
  • Ainsi, les organismes émettant des reçus fiscaux au titre de dons sont désormais dans l’obligation déclarer chaque année à l’administration fiscale, dans les trois mois suivant la clôture de l’exercice, le montant global des dons et versements mentionnés sur ces documents et perçus au cours de l’année civile précédente ou au cours du dernier exercice clos s’il ne coïncide pas avec l’année civile ainsi que le nombre de documents délivrés au cours de cette période ou de cet exercice.
  • L’absence d’une telle déclaration pourra être sanctionnée de 1500€ d’amende.
  • Attention, cette obligation déclarative est applicable aux reçus fiscaux délivrés au titre des dons et versements reçus à compter du 1er janvier 2021 ou au titre des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2021. Les organismes devront ainsi déclarer dès 2022 le montant total des dons et versements reçus en 2021 et pour lesquels ils ont émis des reçus fiscaux.
  • Les donateurs souhaitant bénéficier de la réduction d’impôts permise par les articles 200, 238 bis ou 978 du CGI devront quant à eux être en mesure de présenter, à la demande de l’administration fiscale, les pièces justificatives attestant la réalité des dons et versements. La réalité du versement des dons est donc désormais contrôlée par l’administration.
  • Cette obligation sera applicable à compter du 1er janvier 2022.

 

  • Enfin, les articles 21 et 22 imposent aux associations, fondations et fonds de dotation recevant des avantages ou des ressources, en numéraire ou en nature, de la part d’un Etat étranger, d’une personne morale étrangère, de tout dispositif juridique de droit étranger comparable à une fiducie ou d’une personne physique non-résidente en France de tenir un état séparé de ces avantages et ressources, intégré à l’annexe des comptes annuels.
  • Les fiducies ou personnes morales de droit français agissant comme intermédiaire entre les personnes mentionnées ci-dessus et l’organisme bénéficiaire sont également soumises à la même obligation. Elles sont également tenues d’assurer la certification de leurs comptes dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État, faute de quoi elles pourraient écoper d’une amende de 9 000 €.
  • Le non-respect de cette obligation est puni d’une amende de 3 750 €, dont le montant peut être porté au quart de la somme des avantages et ressources non-inscrits dans l’état séparé.
  • Le manquement à l’obligation de publicité des comptes annuels et du rapport du commissaire aux comptes de l’organisme est puni d’une amende de 9 000 €.

 

Modification pour le secteur associatif

Les changements majeurs pour le secteur associatif sont la mise en place d’un contrat d’engagement républicain ainsi que le renforcement des possibilités de dissolution des associations offerte aux autorités en cas de constatation d’une atteinte à l’ordre public.

  • L’article 12 créer le « contrat d’engagement républicain ».
  • Le contrat d’engagement républicain est un document par lequel l’organisme s’engage à respecter les principes républicains énumérés dans l’article.
  • Ainsi, toute association, fondation ou fonds de dotation qui sollicitera l’octroi d’une subvention auprès d’une autorité administrative ou d’un organisme chargé de la gestion d’un service public industriel et commercial devra souscrire à un tel contrat.
  • En cas de violation de ce contrat d’engagement, l’autorité sollicitée pourra soit refuser d’octroyer la subvention, soit en prononcer le retrait. L’organisme devra alors restituer les sommes reçues.
  • La forme et le contenu exact du contrat n’est pas encore connu. Les modalités d’application de cette disposition seront définies ultérieurement par décret.

 

  • L’article 13 étend l’obligation de souscrire à un contrat d’engagement républicains à tous les organismes agrées pour recevoir des volontaires dans le cadre du mécanisme du service civique ainsi qu’à tous les organismes souhaitant se faire agréer pour participer à ce mécanisme.
  • Le même mécanisme de retrait de subventions sera appliqué en cas de manquement au contrat d’engagement républicain par l’organisme.

 

  • L’article 14 impose au gouvernement de publier, dans les six mois suivant la promulgation de la loi, un rapport analysant les possibilités de créer un fonds de soutien aux associations et aux collectivités territoriales promouvant les principes contenus dans le contrat d'engagement républicain, baptisé « Promesse républicaine ».
    • Ce fonds de soutien sera construit sur le modèle du fonds de développement de la vie associative.

 

  • L’article 15 prévoit qu’une association ou une fondation ne peut désormais être reconnue d’utilité publique que si elle respecte les principes du contrat d’engagement républicain.
  • De plus, les associations, fédérations ou unions d'associations régulièrement déclarées comme ayant une activité dans le domaine de l'éducation populaire et de la jeunesse et qui ont reçu un agrément à ce titre antérieurement à la promulgation de la loi sont désormais tenues, dans les 2 ans suivant la promulgation de la loi, de se mettre en conformité avec la nouvelle obligation de souscription à un contrat d’engagement républicain et de solliciter un nouvel agrément.
  • Cet agrément est désormais valable pour une durée maximale de cinq ans.

 

  • L’article 16 étoffe les motifs de dissolution des associations.
  • Est notamment rajouté le motif d’incitation à des « agissements violents à l’encontre des personnes ou des biens ». La définition des actes de discrimination est élargie aux discriminations à l’encontre des personnes en raison « de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre ».
  • Les associations pourront se voir imputer des agissements commis par leurs membres, agissant en cette qualité, ou des agissements directement liés à leurs activités.
  • L’article prévoyait la possibilité pour le ministre de l’Intérieur, en cas d’urgence, de suspendre l’activité d’une association en attendant sa dissolution, sans que la preuve d’une atteinte à l’ordre public soit pour autant effectivement établie. Le Conseil constitutionnel a toutefois censuré cette disposition car elle a été considérée comme portant une atteinte disproportionnée au droit d’association.
  • Les personnes physiques reconnues coupables d’infractions portant atteinte à l’ordre public seront désormais frappées d’une interdiction de diriger ou administrer une association pendant une durée de trois ans à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive.

 

La transparence est une exigence que nous partageons tous. Le secteur de la générosité est mobilisé sur cette question et travaille activement au renforcement de la déontologie et des bonnes pratiques liées au mécénat. L’Etat, dans son rôle, assure un contrôle nécessaire. Mais Admical déplore l’établissement d’un contrôle généralisé et étendu des organismes collecteurs de dons, sans concertation avec les acteurs concernés. En choisissant de renforcer les contrôles, la loi envoie un message de défiance à l’encontre des acteurs associatifs plutôt que de chercher à s’inspirer et à encourager leur impact réel et concret dans la cohésion sociale.

 

 

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