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[Paroles de salarié engagé] « Le mécénat de compétences a changé mon regard sur le métier »

Paroles de mécènes

©Stop Hunger
Cyrille Bertrand, Responsable Régional des Achats de Sodexo à Marseille, partage sa mission réalisée aux côtés du Programme Alimentaire Mondial, une expérience très enrichissante, tant sur le plan professionnel que personnel !

En quoi consistait votre mission en mécénat de compétences (objet, bénéficiaire, durée, seul ou en groupe …) ?

Je suis parti 15 jours au Bénin en octobre 2018, encadré par notre réseau mondial Stop Hunger et les équipes du Programme Alimentaire Mondial de Cotonou pour travailler sur les questions de sécurité alimentaire des repas scolaires et sur la mise en place des approvisionnements locaux des écoles.

Depuis 2015, le gouvernement béninois a délégué à 620 écoles la responsabilité de la mise en place des comités de gestion des écoles. En 2017, il y a eu 1600 écoles supplémentaires et encore 1600 en 2018, ce qui représente en tout 730 000 bénéficiaires. Le constat a été fait que les enfants allaient plus facilement à l’école sachant qu’ils allaient pouvoir y manger.

Pendant les 15 jours, j’ai participé à des rendez-vous avec différentes instances gouvernementales locales, j’ai également visité plusieurs écoles pour me rendre compte de la réalité du terrain et échangé avec l’association des parents d’élèves et des représentants des producteurs locaux.

A l’issue de ces 15 jours, j’ai effectué une restitution de tout ce que j’avais pu observer et de mes recommandations :

  • Mieux former les cuisinières et les intervenants à la conservation des fruits et légumes et à l’application des bonnes pratiques sur l’hygiène
  • Réaliser une mission spécifique sur l’approvisionnement : constituer une carte de géolocalisation des écoles pour flécher la production locale sur les établissements les plus proches
  • Mettre en place un système de micro-crédit pour la production locale
  • Rendre la visite médicale gratuite pour les mamans qui cuisinent et leur permettre de la faire directement dans les écoles. Aujourd’hui la visite médicale est payante et a parfois lieu assez loin de chez elles alors qu’elles sont bénévoles pour la majorité d’entre elles.

Pendant la durée de la mission, j’étais sur le terrain toute la journée et je travaillais sur mon rapport le soir. Le rythme était très intense mais c’était passionnant !

 

Comment avez-vous connu le mécénat de compétences ? Comment avez-vous été recruté pour cette mission ?

Stop Hunger a créé ces missions au profit du Programme Alimentaire Mondial il y a 3 ans pour contribuer à l’éducation grâce aux repas scolaires gratuits et au dynamisme de l’agriculture rurale en ciblant en priorité l’autonomisation des femmes. 10 missions par an sont proposées aux collaborateurs de Sodexo, de 3 jours à 2 semaines.

Un de mes collègues à Lyon est parti et un autre en Tunisie sur proposition de Stop Hunger pour accompagner le Programme Alimentaire Mondial à l’installation d’une cuisine centrale.

L’opportunité m’a motivé et je me suis rapidement porté volontaire. J’avais déjà vécu en Afrique de l’Ouest et j’avais envie d’apporter mon expérience dans ces pays.

J’ai eu un rendez-vous téléphonique avec l’équipe Stop Hunger puis avec celle du Programme Alimentaire Mondial à Rome (au siège) et enfin avec quelqu’un du bureau local pour bien préparer la mission.

Avant mon départ, j’ai aussi été formé aux risques et sur place, j’étais tout le temps accompagné.

 

Qu’est-ce que cela vous a apporté ?

Beaucoup de choses ! La mission m’a demandé beaucoup d’énergie et il m’a fallu un peu de temps pour me réhabituer à la « vraie vie » mais c’était une expérience tellement enrichissante !

Tout d’abord, j’ai beaucoup appris. Je ne connaissais pas les écoles et leur fonctionnement m’a bluffé.

Et puis, je me suis rendu compte que l’on avait parfois des problèmes dérisoires en France, qu’il fallait savoir relativiser. Quand nous devons gérer une livraison de pilons de poulet de 90g commandés en 110g, au Bénin ils font manger 300 enfants avec une marmite et 3 bouts de bois ! Ils ont également des problématiques de gestion de la rareté que nous ne connaissons pas.

J’ai également vraiment pris conscience des enjeux de gaspillage dans nos écoles face auxquels nous prenons des mesures.

Plus globalement, cette mission a changé ma vision et mes réflexions sur notre métier en France. Grâce à ce mécénat de compétences, je porte un regard nouveau sur la profession et notre contribution aux problématiques d’alimentation dans le monde.

Cela a également impacté ma vie privée. J’ai partagé cette expérience personnelle avec ma famille et ma fille a pris ma mission en exemple dans le cadre de sa dernière année de licence en sciences sociales lors d’une simulation d’une assemblée de l’ONU. C’est une grande fierté pour moi d’avoir réussi à partager cette expérience et ses enseignements avec mes proches.

 

Aviez-vous des aprioris / des craintes sur le mécénat de compétences avant de vous lancer ?

Non, pas du tout, je n’avais simplement jamais eu l’opportunité auparavant.

 

Recommanderiez-vous le mécénat de compétences à vos collègues ?

Je recommande le mécénat de compétences à tous ! Dans mon rapport de mission, j’ai d’ailleurs préconisé que l’on organise une nouvelle mission dédiée cette fois à l’approvisionnement local.

D’ailleurs, j’aurais beaucoup aimé pouvoir repartir mais Stop Hunger privilégie les salariés qui n’ont pas encore pu profiter du dispositif pour que d’autres experts participent à ces missions.

Dans mon équipe, nous nous sommes bien organisés et mes collègues soutenaient ma démarche. J’ai eu l’occasion de leur raconter ma mission à mon retour et tous ont été très touchés par l’impact que nous pouvions avoir dans le prolongement de notre métier. J’espère que certains tenteront bientôt l’expérience !

 

Propos recueillis par Camille Marc

 

 

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