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[DOSSIER COLLECTIVE IMPACT] 3 questions à... Valérie Faillat, Déléguée Générale de la Fondation Sanofi Espoir
Paroles de mécènes
Pour comprendre l’impact de cette approche collective, il faut comprendre l’originalité de ce partenariat. D’un côté, la Fondation Sanofi Espoir soutient et co-construit des projets dans le domaine de la santé et plus précisément des projets qui peuvent contribuer à la réduction des inégalités en santé ; de l’autre, Emmaüs Défi est un laboratoire d’innovations sociales dont l’activité repose sur un chantier d’insertion proposant aux salariés de nombreux métiers (collecte, tri, vente, logistique et livraison). Deux organisations qui ne sont pas vouées à collaborer au premier abord.
En fait, dans le cadre de notre mission, nous avons pu constater que certains des projets que nous soutenons correspondent à des problématiques simples ou compliquées mais qui appellent des solutions techniques et éventuellement des collaborations techniques ou financières. D’autres, en revanche, sont des problématiques de santé qui se combinent à des problématiques sociales complexes. C’est le cas, par exemple, des inégalités en santé pour les personnes en grande précarité ou exclusion.
Les approches traditionnelles, isolées, se soldent souvent par un manque flagrant de résultats et d’impact. Vouloir agir sur la santé de ces personnes est important et la solution technique apporte une réponse immédiate temporaire, mais ne s’inscrit absolument pas dans la durée. Fort de ce constat, il devient évident et nécessaire d’appliquer une autre méthodologie.
De son côté, le chantier d’insertion Emmaüs Défi a fait un constat similaire. Après plusieurs années d’expérience, Emmaüs Défi a pu identifier les principaux freins d’insertion pour les publics en grande exclusion, que sont l’emploi, la santé, le logement, la formation, les difficultés administratives, les questions de handicap ou encore les problèmes d’addictions. Les salariés en insertion d’Emmaüs Défi présentent en moyenne 6 ou 7 freins à la réinsertion et sont souvent accompagnés par plusieurs référents sociaux suivant chacun une problématique spécifique (hébergement, suivi RSA, suivi judiciaire, administratif et emploi). Ainsi est né le projet « convergence » qui cherche à tester un nouveau dispositif d’accompagnement, renforcé et global.
Nos réflexions ont donc convergées vers ce besoin de modifier notre façon de travailler. La solution ne peut venir que d’un véritable décloisonnement des acteurs, d’une coordination de ces mêmes acteurs pour que chacun fasse sa part mais avec un objectif commun, la lutte contre la grande exclusion. Et ça marche ! En 2016, le taux de sorties dynamiques d’Emmaüs Défi a été de 47%, contre 14% avant la mise en place de Convergence. Les comportements tant des bénéficiaires que des différents acteurs impliqués ont évolué, notamment face à l’embauche. Sur la base de ces résultats, la loi a pu être modifiée, allongeant la durée de contrat d’insertion pour ces salariés issus de la grande exclusion. On espère même changer le regard sur l’exclusion et faire la chasse aux idées fausses, notamment sur le coût de l’exclusion.
Un des atouts du projet convergence est qu’il s’agit d’un projet unique, donc inévitablement cohérent, qui est coordonné par une structure centrale, Emmaüs Défi. C’est donc surtout Emmaüs Défi qui rencontre des difficultés ! Celles-ci sont liées à la nécessité de créer des connections entre les différents partenaires pour développer un accompagnement adapté et innovant pour l’insertion des plus exclus.
Un des facteurs clés de succès du projet a été la collaboration avec les pouvoirs publics, principalement au niveau de la ville de Paris qui a souhaité s’engager suite au lancement du pacte parisien de lutte contre la grande exclusion. Le soutien des pouvoirs publics a été mis en place dès le lancement du projet car il fallait pouvoir autoriser l’expérimentation sociale. D’autre part, au-delà du projet lui-même, l’implication précoce des pouvoirs publics doit pouvoir permettre d’envisager un déploiement national et une stratégie de sortie du mode expérimental.
Propos recueillis par Diane Abel