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Se lancer dans le mécénat de compétences : l’importance du management intermédiaire

Expertise

Le dernier baromètre du mécénat d’entreprise réalisé par Admical montre que les entreprises ont saisi l’intérêt du mécénat de compétences, puisqu’elles sont à présent 20% à le pratiquer. Néanmoins il reste certains freins à lever pour soutenir encore davantage cette pratique. Pour cela, le middle management tient un rôle essentiel. Tatiana Heinz, responsable de la recherche et des partenariats internationaux chez Pro Bono Lab, revient pour Admical sur les enjeux liés à la mobilisation des managers dans le développement du mécénat de compétences.

Pro Bono Lab co-construit et développe depuis 8 ans de nombreux programmes de mécénat de compétences avec plus de 50 entreprises françaises sur tout le territoire. Ces programmes ont un impact que nous mesurons sur les structures bénéficiaires (associations, entreprises sociales), mais aussi sur les collaborateurs qui s’engagent, et plus largement sur les entreprises où ils travaillent : fierté d’appartenance, développement des compétences professionnelles mais aussi des savoir-être ou « soft skills », sentiment d’utilité, bien-être au travail… Malgré tous ces impacts positifs, le mécénat de compétences n’est pas encore une pratique généralisée. Alors comment développer cette pratique ? Comment identifier les freins qui peuvent retarder ou empêcher la mise en place du mécénat de compétences, et trouver comment les lever ?

 

Le management intermédiaire et la question du temps de travail

L’une des contraintes régulièrement observée, lorsque nous discutons de la possibilité de mettre en place le mécénat de compétences au sein de l’entreprise, est la question du management intermédiaire. Dans la plupart des situations, la demande pour participer à ce type d’initiative vient soit de la direction de l’entreprise (direction générale, ressources humaines, RSE) ou de la fondation d’entreprise, soit d’un groupe de salariés qui désire créer de tels programmes. Rarement, les managers des salariés qui seraient amenés à participer sont consultés. Au pire, le programme leur est imposé, sans effort de communication préalable.

Pourtant, leur rôle dans l’entreprise est crucial. En effet, ces managers participent au bon fonctionnement de l’organisation en veillant au bon usage du temps de travail des salariés dont ils ont la charge. Pour ces personnes, toute la difficulté liée au mécénat de compétences est donc de laisser l’initiative à leurs salariés de dégager du temps de travail pour participer à une action solidaire ou accompagner un acteur de l’utilité sociale. Cela peut représenter quelques heures comme plusieurs jours, voire plusieurs mois.

 

Les managers, garants de la montée en compétences

Pour autant, il ne faut pas oublier que les managers intermédiaires sont également les garants du développement des compétences des salariés dont ils ont la charge. Leur rôle est de les faire monter en compétences sur leurs postes. Or, le mécénat de compétences, par son principe même, organise le partage de compétences des salariés vers des structures à finalité sociale. Ce partage n’est cependant pas à sens unique : lorsque des collaborateurs d’entreprise participent à une journée de solidarité pour aider une association, lorsqu’ils accompagnent pendant plusieurs mois une entreprise sociale à raison de quelques heures par semaine, ces projets en mécénat de compétences leur permettent de mettre en pratique les compétences acquises durant leur carrière professionnelle. Il s’agit non seulement des compétences métiers (stratégie, gestion de projet, communication, droit, informatique, ingénierie…) mais aussi leurs soft skills ou savoir-être : l’importance d’être à l’écoute, de savoir s’adapter à un contexte différent de celui auquel on est habitué, de montrer des capacités de leadership pour mener une équipe ou proposer des recommandations à la structure accompagnée. En étant au contact d’une organisation à finalité sociale, les salariés utilisent leurs compétences dans un nouveau cadre, un cadre qui a du sens pour eux. Il s’agit d’une opportunité de développement de leurs compétences, de montée en compétences.

 

Mieux intégrer les managers dans le cadrage du mécénat de compétences

Il y a donc un véritable enjeu, pour le management intermédiaire, à valoriser ce type d’engagement, à le rendre possible pour favoriser le développement des compétences de leurs salariés. Pour cela, un effort de sensibilisation et de formation est nécessaire, tout en faisant en sorte que les projets en mécénat de compétences ne viennent pas freiner le bon fonctionnement de la structure. Depuis 2017, la fondation Nexity organise l’opération « Ensemble pour une ville plus solidaire », des journées solidaires impliquant les salariés du groupe pour venir en aide à des associations, partout en France. Cette année, cet évènement organisé en juin a permis de mobiliser près de 500 collaborateurs sur 41 projets dans 28 villes françaises. La première édition avait soulevé la question du rôle des managers auprès des personnes participantes. Ces dernières avaient évoqué le fait qu’il était important pour elles d’avoir le soutien de leur manager pour participer à cet évènement, sans quoi il leur semblait problématique de s’engager. Cela montre que le rôle des managers est crucial pour encourager leurs équipes à participer à ce type d’initiative.

 

Pour conclure, si le manager intermédiaire joue un rôle déterminant dans la bonne conduite des activités de l’entreprise en supervisant le temps de travail des salariés qu’il supervise, c’est aussi parce qu’il influence nécessairement le développement des compétences de ces derniers. Par conséquent, il est important de les sensibiliser aux bénéfices du mécénat de compétences et à leur rôle dans ce dispositif. Le mécénat de compétences doit être appréhendé comme une démarche globale au sein de l’entreprise et à ce titre, être compris par tous, engagés ou non.

 

Tatiana Heinz, 

Responsable de la recherche et des partenariats internationaux chez Pro Bono Lab

 

 

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