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Prise de risque, évaluation et impact : le modèle du Contrat à Impact Social

Expertise

Tout droit venu de Grande-Bretagne, le Contrat à Impact Social se développe progressivement en France. Pour mieux comprendre ce nouveau système de financement, retour avec l’ADIE – l’Association pour le Droit à l’Initiative Economique – sur un exemple de partenariat réussi.

En 2016, l’ADIE lançait le 1er Contrat à Impact Social (CIS) en France, dont l’objectif était de mettre en place un programme de microcrédit accompagné et adapté à la ruralité. Plus de deux ans après ce lancement, nous revenons sur cette belle aventure qui a permis d’associer l’ADIE à des partenaires privés, au service des besoins de bénéficiaires.

Parmi les partenaires, nous retrouvons AG2R la Mondiale, BNP Paribas, la Caisse des Dépôts, la Fondation Avril et Renault Mobiliz Invest.

 

L’ADIE, dans le rôle du coordinateur

Lorsque le premier appel à projet concernant le CIS est apparu en France, l’ADIE, l’association pour le droit à l’initiative économique, n’a pas hésité à se lancer dans l’aventure. Et c’est tout naturellement qu’en novembre 2016 l’Etat signe un protocole d’engagement auprès de l’association avec, quelques mois plus tard, un premier projet qui voit le jour.

Pour Nesrine Dani, responsable des partenariats privés, « l’innovation du projet n’est pas dans la solution, puisqu’elle existait déjà au sein de l’ADIE, mais dans la méthode et les savoirs faire mis en place. » En effet, l’ADIE, déjà forte de son expérience d’accompagnement et de financement des projets, a dû revoir et transformer son modèle en procédant notamment à une instruction des dossiers à distance et un renforcement de l’accompagnement. C’est donc une véritable valeur ajoutée pour la structure que l’engagement dans ce type d’accompagnement. La transformation du mode d’action classique a aussi permis d’élargir l’impact des actions sur le territoire et notamment sur des zones très rurales. « Ce CIS a permis de modéliser une action pour répondre à un besoin d’utilité publique » ajoute Nesrine Dani.

 

Le CIS confère donc à l’ADIE une véritable évolution de ses pratiques, même s’il comporte tout de même des risques tels que la difficulté à bien identifier les profils (à distance), à instruire correctement les dossiers et à impliquer un remboursement des sommes prêtées.

Pour prouver l’efficacité du projet, 3 grands domaines d’évaluation ont émergé afin de définir les indicateurs à étudier.

Ces domaines d’évaluation prennent compte :

  • des indicateurs de moyens, c’est-à-dire le nombre de personnes accompagnées et financées.
  • des indicateurs de résultats, soit le du nombre de personnes insérées professionnellement 2 ans après le financement du projet, dans un contrat durable, au sein de son entreprise ou d’une autre structure. Au-delà de la création d’activité rémunératrice, le CIS vise une véritable mise à niveau de l’employabilité du bénéficiaire.
  • des indicateurs concernant le public soutenu par le CIS et de ses caractéristiques correspondantes aux objectifs de l’ADIE, pour qui il est essentiel que le public soutenu corresponde à un à public dans le besoin, tel qu’il aura été qualifié par un score d’exclusion sociale et financière.

La réussite de ce projet permettra à l’ADIE d’envisager d’autres Contrat à Impact Social sur le reste du territoire, et d’impliquer de plus en plus les autorités locales dans cette dynamique.

 

AG2R la Mondiale, dans le rôle du partenaire

L’entreprise est un partenaire de l’ADIE depuis plusieurs années via le fonds d’innovation créé afin de permettre l’expérimentation de nouvelles relations avec les partenaires associatifs et de « créer ensemble ». Les deux structures sont aussi très proches sur la thématique du territoire et de son développement. Il été donc tout naturel qu’AG2R suive l’ADIE dans cette nouvelle expérimentation, d’autant plus que des échos très positifs se faisaient entendre depuis l’Angleterre (pays d’origine du contrat).

Selon Marielle Del’homme, responsable des partenariats du fonds d’innovation, l’entreprise n’a pas hésité à s’associer à ce projet, qui questionne et prend en compte des aspects très importants du financement : l’évaluation et le rapport entre secteur privé et public.

Le CIS implique en effet une forte dimension évaluative qui va permettre de rendre compte de l’efficacité du financement et de l’atteinte des objectifs fixés. Ces résultats sont d’une importance capitale pour que le remboursement des partenaires financiers puisse avoir lieu, preuve de la viabilité et des impacts positifs du projet.

Au-delà des valeurs communes telles que l’innovation, l’emploi et les territoires, le secteur privé contribue largement au financement de l’intérêt général en faisant de cet engagement une réelle « prise de risque », selon Marielle Del’homme. Grâce à sa participation au projet, le fonds d’innovation d’AG2R prouve que le secteur privé est plus qu’essentiel dans le domaine de l’intérêt général. A l’issue de l’expérimentation et du rapport d’impact, les financeurs seront remboursés par l’Etat, qui, il faut l’espérer, s’emparera du sujet et de l’expérimentation, pour un essaimage plus global.

 

Nadine de Jules & Co, dans le rôle de la créatrice d’emploi

Enfin, nous avons eu l’occasion d’échanger avec Nadine, qui vient de créer sa propre activité, grâce au soutien financier du Contrat à Impact Social.

Après une période sans travail, l’idée lui vient de monter son entreprise. Mais quand on est au RSA, il est bien difficile d’obtenir un financement des banques traditionnelles. C’est tout naturellement vers l’ADIE que notre créatrice s’est tournée.

Le rendez-vous est pris, l’instruction du dossier et l’accompagnement se déroule à merveille grâce à une équipe « très performante dans l’administratif et la relation ». Nadine peut alors se lancer, sans empiéter sur son budget quotidien et créer ses petites poupées dont elle a le secret. La marque Jules & Co naît en mai 2018 et rencontre depuis un franc succès. Les créations s’enchaînent, la marque se développe et des partenariats avec d’autres créatrices émergent. Nadine vend ses poupées dans toute la France et même en Belgique. Le format CIS lui a permis de lancer sa propre activité, viable et pérenne, tout en lui permettant d’aborder l’aspect financier plus sereinement : pas d’inquiétude en fin de mois, pas de gestion des soucis financiers et un remboursement en mensualité adaptée. Le futur semble radieux pour les poupées de Nadine, qui souhaite développer sa gamme et investir dans un local.

Voila une jeune cheffe d’entreprise heureuse, avec un bel avenir devant elle !

 

Tifenn André

 

 

 

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