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Pratiques des entreprises et aspirations des collaborateurs... quels liens, quelles pratiques et quels impacts sur les individus et au sein de l'organisation ?

Synthèses d’études

Cette étude, conduite par le Pr. Serge Perrot dans le cadre d'un partenariat entre l'Observatoire de l'Engagement et l'Université Paris Dauphine, propose une analyse qualitative des pratiques de 10 entreprises pour comprendre les impacts différenciés que peuvent avoir celles-ci sur les collaborateurs.

De nombreuses pratiques peuvent illustrer le concept d’engagement pluriel (dons, parrainages, projets solidaires, courses solidaires, actions liées à une politique RSE, bénévolat, mécénat de compétences, team building solidaires, etc.). Afin de dépasser la logique d’un simple benchmark, l’étude propose une analyse plus qualitative des pratiques de 10 organisations (AXA, BNP Paribas, Danone, Kaporal, Le Lab RH, Leroy Merlin, Sanofi, SAP, Sodexo, Somfy) pour comprendre les impacts différenciés que peuvent avoir celles-ci sur les collaborateurs. A noter que sont exclues du champ de cet article les actions purement à l’initiative des salariés (ex : engagement personnel dans l’associatif hors du travail).

 

Notre étude propose d’interroger la (re)conception des pratiques d’engagement pluriel autour de trois questions qui nous ont paru structurantes. Ces trois questions constituent autant de curseurs permettant de positionner ou de caractériser les pratiques d’engagement pluriel :

  • Quelle est la résonnance entre d’une part, les pratiques mises en place et l’entreprise (son métier, sa culture, sa mission), et d’autre part, entre l’offre d’engagement et les appétences des salariés ?
  • Les offres d’engagement suscitent-elles un ensemble hétérogène d’engagements individuels ou des occasions d’engagements collectifs ?
  • Dans quelle mesure les actions d’engagement pluriel sont-elles intégrées dans l’écosystème de l’entreprise ?

 

Nous défendons l’idée que, selon le positionnement des pratiques d’engagement pluriel sur ces 3 axes, leur impact sur les collaborateurs ne sera pas le même. Cet article utilise une théorie de la motivation (la théorie de l’auto-détermination) pour expliquer comment la manière de (re)concevoir les pratiques d’engagement pluriel permet (ou non) de renforcer la motivation des collaborateurs. Pour illustrer, nous proposons un focus sur la première question, liée à la résonnance des pratiques d’engagement pluriel avec l’entreprise et avec les collaborateurs.

 

La première résonnance est celle entre les pratiques d’engagement pluriel et l’entreprise. Partons d’un exemple concret de pratique comme le bénévolat. On peut imaginer un dispositif dans lequel une entreprise propose à des salariés de s’engager pour une cause choisie à travers des actions comme une course solidaire (recueil de fonds), du soutien scolaire, du parrainage d’associations, etc. Dans ce cas, le lien avec le métier n’est a priori pas évident, et la résonnance avec l’entreprise plus faible. A l’inverse, le bénévolat peut se traduire par la réalisation de projets illustrant la mission, la culture, ou le métier de l’entreprise. La résonnance avec l’entreprise est alors plus forte. Si toutes ces actions peuvent être considérées comme intrinsèquement positives, elles n’ont pas le même impact auprès des salariés. Les pratiques en forte résonnance avec l’entreprise favorisent le développement d’un sentiment d’appartenance. Dans le cas d’un mécénat de compétences par exemple, le sentiment et la fierté d’appartenance à l’entreprise sont renforcés si les compétences correspondent au cœur métier. L’appartenance est l’un des besoins évoqués dans la théorie de l’auto-détermination.

Ainsi, les pratiques d’engagement pluriel en résonnance avec l’entreprise pourront davantage favoriser la motivation des collaborateurs que celles déconnectées de l’entreprise (au sens de son métier, sa culture, sa mission …). Un deuxième besoin lié à la motivation est le sentiment de compétence : à nouveau, une connexion avec les compétences métiers de l’entreprise est de nature à avoir un impact plus fort sur l’engagement global des salariés. Le troisième besoin est l’autonomie, qui suggère que les pratiques d’engagement pluriel permettront mieux de (re)motiver les salariés si elles sont suffisamment déconnectées de leur manager !

 

La deuxième résonnance s’entend entre l’offre d’engagement et les appétences des salariés. La théorie de l’auto-détermination identifie des sources de stimulation d’importance variable selon les personnes : il s’agit des sensations, des connaissances, et de l’accomplissement. A titre d’exemples, la participation à une course parlera ainsi davantage aux personnes sensibles aux sensations, le mécénat de compétences à ceux stimulés par les connaissances, et les challenges de résolution de problèmes ou l’aboutissement de projets concrets à ceux sensibles à l’accomplissement. Afin de répondre au défi d’une certaine résonnance entre l’offre d’engagement et les salariés, il est donc pertinent d’avoir une offre multi facettes jouant sur les différentes sources de stimulation.

 

Il est possible de poursuivre un raisonnement similaire autour des autres questions présentées initialement. Ainsi, les pratiques d’engagement qui offrent des occasions d’engagements collectifs ont un plus grand potentiel pour susciter un engagement global des salariés que celles qui se traduisent par une simple addition d’engagements individuels hétérogènes. De même, les actions intégrées dans un écosystème plus large offrent des occasions d’oxygénation, de renouvellement des liens à la fois internes et externes, d’innovations, etc. bénéfiques non seulement aux salariés mais sans doute également à l’entreprise.

 

Serge Perrot

Professeur de management à l’Université Paris Dauphine

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